Chaque automne, la petite cabane du Sentier devient le cœur battant du rire combier. Le Cabaret de la Tranchée, troupe de comédiens amateurs aussi bien cuisiniers, serveurs que chanteurs, y livre un spectacle haut en couleur mais aussi en saveur. Avec « DESCONS-STRUCTION », la cuvée 2025, la tradition se perpétue dans une ambiance festive et bienveillante, héritée de plus de 70 ans d’une riche histoire.
Une histoire née du verbe et sauvée par la passion
C’est en 1951 que le Cercle littéraire (et avant ça, le Club du Samedi) voit le jour, fondé par Émile “Doudy” Meylan. D’abord dédié aux textes classiques, l’esprit change progressivement au fil des décennies : moins de dramaturgie, plus de sketchs, de chansons, de liberté. Marina Lecoultre, actuelle présidente, rejoint l’aventure en 1988 : « La première année, je servais simplement. En 1989, je suis montée sur scène et je n’ai plus jamais quitté le navire. » En 1990, alors que la troupe manque de bras, Marina et deux compagnons relancent le spectacle in extremis. Ce sursaut marque le début d’un renouveau. En 1996, la troupe rachète la fameuse « cabane de la Tranchée » et lui donne son nom actuel. Un lieu devenu sacré, véritable écrin du rire local.
Une cabane magique où l’on rit… et où l’on mange
Le cabaret ne serait pas ce qu’il est sans son atmosphère unique. Dans cette salle intime d’une cinquantaine de places, les spectateurs prennent place à table pour un repas-spectacle hors du commun. Ce sont les comédiens et amis de la troupe eux-mêmes qui assurent le service entre deux sketchs : « Multitâche ? Disons simplement que Bertrand (ce qu’un turbo est à une voiture) peut débarrasser une assiette et réapparaître sur scène une minute après ! » s’amuse Marina. Cette proximité crée un lien humain rare, où l’on partage autant la scène que la table. La cuisine, orchestrée par le chef Christophe Vaney, devient un personnage à part entière : galantine de volaille, Saint-Jacques gratinées, souris de chevreuil… Rien n’est laissé au hasard. Pour les soirées sans repas complet, les fameuses ardoises régionales garantissent la convivialité jusqu’à l’entracte.
Une création collective, sans metteur en scène
Chaque spectacle est une œuvre collégiale. Dès janvier, les membres de la troupe proposent des sketchs, des chansons, parfois même des textes trouvés ici et là. En juin, on vote, on tranche, on ajuste. « Il peut y avoir plus de 100 propositions, mais au final, on n’en garde qu’une trentaine », explique Bertrand Mouquin, vétéran de la troupe. Aucun metteur en scène ne dicte les choix : ici, la démocratie est reine. L’absence de hiérarchie favorise une ambiance bon enfant, sans renier l’exigence. À l’arrivée, un spectacle de deux heures prend vie, chorégraphié jusque dans les déplacements dans le noir, toujours avec humour et bienveillance et surtout le piano “magique” de François Bettens. Nathalie Rochat excelle quant à elle à créer l’ambiance sonore et lumineuse qui ajoute encore à la magie du moment.
« DESCONS-STRUCTION » : une édition à bâtir et à rire
Le spectacle 2025, intitulé « DESCONS-STRUCTION », poursuit la tradition avec une trentaine de numéros, entre parodies, chants décalés et clins d’œil locaux. Des titres comme « Fioul sentimental » ou « Le papet vaudois » promettent des éclats de rire. La troupe, composée cette année de huit comédiens, compte des piliers comme Marina Lecoultre, Bertrand Mouquin ou Mireille Rochat, mais aussi de jeunes recrues comme Nell Dépraz et Manoe Peter (spoiler : qui ressuscite Elie Kakou !!) qui reviennent pour la seconde fois ou encore Manu Dufour qui apporte une brillante présence à un ensemble déjà grandiose. Le pianiste star François Bettens, « l’âme du cabaret », rythme les scènes tout en assurant les transitions musicales. Côté cuisine, c’est une pure merveille comme chaque année.
Rituels, fidélité, santé et décrochage d’horloge
Chaque soir, avant d’entrer en scène, les comédiens glissent une pièce de 5 centimes sur la rampe menant à la scène – un porte-bonheur devenu tradition grâce à un trouvaille de Christophe Bifrare. Juste avant le lever de rideau, tous trinquent avec un verre de rouge en se lançant un vibrant « vas-y mon gars ! ». Bertrand quant à lui, décroche l’horloge du mur : “Le temps ne compte pas les soirs de spectacle”. Le Cabaret de la Tranchée, c’est aussi ça : un esprit de famille. Le public ne s’y trompe pas : les représentations affichent complet dès octobre, preuve de l’attachement régional. « C’est vous, le public, qui nous donnez du jus », confie Marina. Héritière de plus de 70 ans d’art scénique, cette joyeuse bande continue de faire rire, chanter, servir, improviser… et recommencer l’année suivante. Le rire comme art de vivre – et comme plat principal.
— florent
Source : FAVJ
«On revient chaque année comme une rage de dents», avance Marina Lecoultre. «Dis plutôt un baume», la corrige Mireille Rochat. Les joyeux lurons du cabaret sont attablés dans leur salle de la Maison des jeunes, sur les hauts du Sentier, connu aussi comme le Cabaret de la Tranchée – leur salle, au fond, eux qui y écument les planches depuis plus de quarante ans avec leur spectacle de rires et chansons. «Qu’est-ce que ça va être dur de passer novembre sans pouvoir jouer!», se désole Mireille Rochat. Le mot est lâché. Quoi, pas de cabaret cette année? Eh ben non. La faute au dos de leur pianiste. Tout se passait comme sur des roulettes depuis le début des répétitions à la mi-août, las: «On a appris la mauvaise nouvelle début septembre, qu’il devait être opéré. Il serait ensuite «à l’assurance» jusqu’au jour même de la première», explique Bertrand Mouquin. «Dès lors, on a tout considéré: aller répéter chez lui pendant sa convalescence, travailler avec des bandes-son, rien n’y faisait. Comprenez, les acteurs font aussi office de serveurs et de cuisiniers lors des quatre soirées de spectacle avec repas…»
IRREMPLAÇABLE
Mais pourquoi ne pas remplacer ce fameux pianiste? Trop de connivence, trop de chemin parcouru ensemble… et trop avancés dans les répétitions pour pouvoir se retourner: François Bettens de son nom a paru simplement irremplaçable auprès de ses compagnons. Ceux-ci ont préféré renoncer à ce rendez-vous annuel du début novembre devenu un rituel pour le public é. Autre raison de ce retrait inhabituel alors même que le spectacle 2018 est quasiment prêt: «On reste des amateurs et on le revendique mais… on ne voulait pas présenter un “demi-cabaret” en changeant le casting à la dernière», explique Marina Lecoultre. À côté d’elle, sur ses béquilles, Mireille Rochat complète: «Est-ce que tu te rends compte que par solidarité, je me suis peté la guibole… Qu’on n’ait ainsi plus aucun regret de ne pouvoir nous produire sur scène?».
LOT DE CONSOLATION
Quand pourra-t-on revoir les Mouquin, Lecoultre et consorts (la troupe totalise une douzaine d’acteurs, sans les techniciens) sur les planches? Les 8 et 9 mars à l’occasion du week-end de la Chorale de l’Orient, dont il assureront la deuxième partie. Et dans une année à compter d’aujourd’hui, lors de leur rendez-vous rituel de novembre, si aucun autre imprévu ne se déclare, touchons du bois! «On songe même à augmenter le nombre de représentations en 2019», indique Bertrand Mouquin, «vu qu’une grosse partie du spectacle est déjà dégrossi… et pour montrer notre bonne volonté». «C’est très envisageable, car nous serons on manque de scène, intoxiqués jusqu’au trognon», complète Marina Lecoultre. Le cabaret fait en effet toujours salle comble et, en une quinzaine de représentations, totalise un public d’un millier d’habitués de la Vallée et au-delà. Le spectacle est toujours plein avant la première. Nul doute que ces prolongations – pour se faire pardonner? – trouveront preneur.
— Joël Reymond
Source : FAVJ
Contrairement à ce que suggère ce cliché, l’harmonie règne au sein de la troupe du cabaret.
Aucune scission en vue: c’est un problème de santé qui a amené à l’annulation du spectacle de cette année.